Et une fois de plus, la voix monotone du secrétaire général de l’Elysée égrènera sans aucun commentaire la liste des ministres du nouveau gouvernement. Quelque soient les compétences de tous ceux qui ont occupé ce poste, n’est-il pas un peu paradoxal que le Président et le Premier Ministre aient délégué la communication d’un de leurs actes les plus importants à un tiers non identifié par l’opinion. N’est-il pas surprenant qu’une des deux têtes de l’exécutif, voire les deux, ne se saisissent pas de ce moment pour lui donner du sens ?
On s’étonne souvent que les remaniements aient peu d’impact dans l’opinion. Il y a bien sur plusieurs raisons à cela : Sentiment souvent d’un jeu de chaises musicales. Constat pour ceux qui expriment une défiance vis-à-vis du pouvoir en place qu’il ne s’agit que rarement d’une inflexion de politique. Constat logique et encore renforcé par le quinquennat que les vrais pouvoirs sont détenus à l’Elysée, Matignon et que finalement les Ministres n’ont peu de marges de manœuvre propre. Tout cela s’additionne et banalise l’impact des remaniements.
Mais l’absence de portage politique me semble être un facteur multiplicateur. Les citoyens savent décoder les ressorts de la communication. Ils savent que quand un responsable ne s’exprime pas, c’est qu’il ne souhaite pas donner à telle ou telle action un impact particulier. On pourrait donc imaginer que les règles de la communication moderne s’appliquent désormais aux remaniements.
Cela donnerait par exemple ceci :
Le Président et le Premier Ministre , côte à cote, pour une conférence de presse (image assez rare)
Le Président prend la parole et explique les objectifs qui ont prévalu à la formation du nouveau gouvernement, et les objectifs qui ont été les siens en le composant. Il revient sur ce qui n’a pas fonctionné (retour sur expérience) et explique aussi les nouveaux découpages ministériels
Le Premier Ministre lui succède : il présente les nouveaux Ministres, (une petite vidéo de 30 secondes revient sur leur parcours), et surtout il justifie les choix : « Si j’ai proposé au Président de nommer Monsieur X ou Madame Y, c’est parce que son action dans sa fonction précédente, l’initiative qu’il a conduit sur tel domaine, nous a semblé correspondre à ce que nous voulons faire , etc…. Il donne les clés de l’évaluation (transparence) à laquelle seront soumis les ministres douze mois après
Le Président de la République conclut en donnant la feuille de route de l’année qui s’ouvre pour le nouveau gouvernement. 3 priorités, 5 réformes-clés, des objectifs chiffrés.
Certes, tout ne serait pas dit. Ne soyons pas naïfs : Les calculs politiques inhérents aux formations de gouvernement ne disparaîtraient pas et ne seraient pas expliqués. Mais le citoyen pourrait mieux comprendre le sens d’un remaniement et surtout envisager comment l’action gouvernementale va en être impactée. Plutôt qu’un jeu de chaises musicales, le choix de femmes et d’hommes y retrouverait un sens. Et le secrétaire général pourrait se concentrer à sa tâche, essentielle, faire qu’ensuite la machine gouvernementale fonctionne. Il a déjà fort à faire.
Bernard SANANES
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